Alors? Tous saints?

Alors? Tous saints?

Toussaint. Alors? Tous saints? Vraiment? N’est-il pas écrit, à propos du Seigneur: Toi seul est saint (Ap 15,4)?

Je mordille mon crayon: comment parler de sainteté? Mon attention s’évade par la fenêtre, comme si l’obscurité pouvait donner quelque clarté à ma pensée…

Et là, à l’horizon, paraît la Lune.

La Lune…

Dans la nuit, elle luit de lui.

Dans la nuit, elle dit l’apparent absent toujours présent.

Comment s’y prend-elle? En cherchant le parfait face-à-face avec le Soleil, à l’heure où nul ne le voit plus. Alors, son rayonnement devient le sien. Lune lumineuse d’être illuminée par ce seul autre qu’elle révèle.

La marche du monde ou des planètes vient faire obstacle à ce solaire tête-à-tête? La Lune s’échancre d’ombre, certes, et même parfois jusqu’à ne plus reluire du tout, mais le Soleil cesse-t-il de briller comme avant, comme toujours, comme jamais?

Le Soleil, comme cet éternel murmure à la Lune: Cherchez ma face (Ps 26,8).

Le Soleil, comme ce désir brûlant de s’entendre répondre: C’est ta face, Seigneur, que je cherche: ne me cache pas ta face (Ps 26,9).

Non, la «sainteté» de la Lune n’est pas d’abord l’éclat qu’elle reçoit et diffuse, mais son désir du Soleil, jusqu’à l’oubli de luire elle-même. Alors la Lune peut s’exclamer: Dans cette nuit où je crie en ta présence (Ps 87,2), la nuit comme le jour est lumière (Ps 138,12) !

Une image, bien sûr, reste une image: impropre à dire tout à fait le réel. Dieu est plus que le Soleil, la sainteté plus qu’une planète exposée, malgré elle, au rayonnement solaire. Je le sais bien. Mais puisque mon image est imparfaite, utilisons jusqu’à son imperfection pour faire un pas de plus vers Dieu. Notre ciel ne connaît qu’une seule Lune? Le Ciel, lui, des myriades de saints. C’est donc que la sainteté n’est pas une exception. Elle est ta vocation, ma vocation et celle de toute personne depuis la fondation du monde. Notre humaine vocation à la sainteté est semblable à la Lune: croissant vers la plénitude.

Jacques Doutaz, membre du CRV, Toussaint 2021

Crédit photo: Jules Joris