Le devoir de tirer les leçons du passé

Le devoir de tirer les leçons du passé

La Conférence des évêques suisses (CES) a initié et commandé ce projet en collaboration avec la Conférence des unions des ordres religieux et autres communautés de vie consacrée en Suisse (KOVOS) et la Conférence centrale catholique romaine de Suisse (RKZ). C’est un devoir de justice envers toutes les victimes. Étant donné que c’est l’Église catholique romaine, avec ses structures de pouvoir héritées de l’histoire, qui est à l’origine de ces actes, il est indispensable que la recherche exhaustive de tous les abus et de leurs causes soit traitée de manière absolument indépendante par rapport aux trois institutions. La Conférence des évêques suisses est donc très reconnaissante à Monika Dommann et Marietta Meier, toutes deux professeures au Département d’histoire de l’Université de Zurich, d’avoir accepté de diriger ce projet, et à la Société suisse d’histoire (SSH) d’en assurer le suivi et d’avoir nommé un comité scientifique.

Les victimes d’abus de pouvoir, de manipulation des conscience et d’agressions sexuelles ne peuvent pas vivre en paix tant que les injustices subies ne sont pas mises en lumière, que leurs causes ne sont pas élucidées et que les auteurs ne sont pas tenus de rendre des comptes. L’Église, bien plus que la société civile, doit tout mettre en œuvre pour répondre enfin à cette exigence tout à fait légitime. Le pardon, la miséricorde et la satisfaction ne peuvent pas remplacer une action juste et une procédure judiciaire. Il est nécessaire de mettre en lumière les crimes du passé commis au sein de l’Église catholique romaine. Il faut en tirer les leçons et tout mettre en œuvre pour qu’aucune injustice ne puisse plus se produire. Le traitement du vécu est, avant tout, un juste dû aux personnes concernées. C’est la condition sine qua non pour toutes les autres étapes visant à promouvoir une conduite professionnelle à tenir dans les services d’aumônerie, ainsi qu’une perception adéquate de la proximité et de la distance dans le domaine ecclésial. Établir cette césure nette est le premier pas vers une Église qui se construit rigoureusement sur la confiance et le respect.

Les instances dirigeantes ont le devoir de tirer les leçons du passé et de tout mettre en œuvre pour que les personnes soient suffisamment protégées dans leur dignité et leur intégrité sexuelle. Cela présuppose que l’Église devienne une organisation apprenante, prête à reconnaître ses propres erreurs et à modifier les structures existantes qui ont permis ou favorisé les crimes et leur dissimulation. L’étude – qui commence maintenant avec ce projet pilote – et ses résultats devraient poser les jalons pour une Église catholique romaine libérée de la peur. Au premier rang se situent les fidèles et toutes les personnes qui viennent à eux avec leurs préoccupations, mais aussi les aumôniers et les autres collaborateurs et collaboratrices de l’Église.

Ce thème demeurera dans nos esprits. Nous nous remettrons toujours en question à l’avenir. C’est important et juste. L’enquête et la divulgation des erreurs et des omissions
du passé ne sont que le début du chemin à parcourir. Le travail de mémoire, la reconnaissance de sa propre culpabilité et surtout la prévention vont – et doivent – se poursuivre. Il est nécessaire de revoir les structures ecclésiales, les voies décisionnelles et la répartition des responsabilités afin de prévenir efficacement les abus sexuels et spirituels.

Joseph Maria Bonnemain, évêque de Coire,
Responsable à la Conférence des évêques suisses
de la thématique “Abus sexuels dans le contexte ecclésial”

Pour en savoir plus sur le projet pilote :

Crédit photo: Bernard Hallet | cath.ch